Quelques jours vécus en Espagne, sur le Chemin, et ce qui me frappe pour le moment, c’est le mode « auberge espagnole » des auberges de pèlerins sur le Chemin. J’ignore si l’expression vient de là ou non, mais ça serait bien possible.
Au bout de quelques jours, donc, on revoit les mêmes têtes, beaucoup de pèlerins de toutes les nationalités venant pour faire le Camino Francès, des Pyrénées à Saint-Jacques. Comme en France, on traverse des petits villages qui semblent parfois ne vivre qu’à l’heure du Camino, avec les pèlerins, leur « mode de vie » et leurs horaires.
Exemples en images :
Hier, à Villamayor de Monjardin, petit village d’une centaine d’habitants, et 2 « albergues » (équivalent du gîte d’étapes) et 1 « casa rural » (d’après ce que j’en comprends, c’est plutôt la version chambre d’hôtes). Au total, la capacité d’accueil des pèlerins est de 50. Hier, c’était complet et ça débordait.
Ça, c’est une albergue « completo », après la douche et la lessive de tout le monde : nonchalance en tongs bienvenue, les petites culottes et les chaussettes en arrière plan. Au bar du village (un seul bar, qui fait restaurant avec son « menu pèlerin »), le reste des habitants d’un soir attaque l’apéro, ou le second apéro, ou le troisième… Certains préfèrent trinquer sur la place du village, avec le vin tiré de la fontaine de vin croisée dans la journée.
Bref, il y en a partout et on a l’impression de connaître tout le village.
Certains arrivent encore, à pieds et à vélo… On les met où? Ils choisissent entre dormir dehors, sur un terrain de « pelota » , ou prendre un taxi pour le prochain village à 12 km… 5 ou 6 pèlerins dormiront donc à la belle étoile, dans la bonne humeur parce que « ça fait parti du Chemin! ».
Sur la terrasse et au dîner, ambiance cosmopolite et bon enfant. Ça parle anglais, surtout, français, espagnol, allemand ou hollandais, avec enchaînement de minestra de Navarre et de natillas en dessert. Tout le monde n’a pas tout compris à ce que son voisin lui racontait, mais tout le monde avait un sourire jusqu’aux oreilles. C’est le principal, et c’est ce qu’on retient tous de ces moments, le soir à l’étape.
Cet après-midi, dans le parc de l’église de Viana, c’était du même genre, en mode sieste et papotage sous un arbre. Et nous avions investi le parc public avec les tancarvilles, histoire que le linge soit sec avant le couvre-feu de l’auberge.
Ça me donne l’impression de vivre dans une grande colocation avec plusieurs dizaines de colocataires, jamais tout à fait les mêmes, mais on retrouve toujours des gens connus. Ça rentre, ça sort, ça se salue ou ça se sourit, ça fait la queue pour prendre la douche, pour aller aux toilettes et même pour faire la lessive. Ça mange à n’importe quelle heure, à l’envie et selon l’habitude ou la culture. On dort tous dans des dortoirs, logés à la même enseigne d’où qu’on vienne, avec des boule quies. De toute façon, on a quelques kilomètres sous les pieds, donc on dort, même dans un dortoir de ronfleurs… Et si les boule quies ne suffisent pas, le vin rouge peut toujours aider… À dormir et/ou à ronfler…